Mali: Accord de paix, ce que l’on peut dire de sa mise en œuvre

Mohamed Ag Ahmedou et Alassane Cissé

Depuis sa signature, l’accord de paix au Mali   issu du processus d’Alger le 15 mai et son parachèvement le 20 juin 2015 par la CMA, sa mise en œuvre devient de plus en plus difficile pour plusieurs causes.

La véritable question qui se  pose au regard de la situation du pays est de savoir  ce qui bloque son application.

Il faut d’abord rappeler que le Mali traverse depuis 2012, une profonde  crise multidimensionnelle qui paralyse jusqu’à présent  l’ensemble de son territoire.

En 2012 avec le déclenchement de la rébellion à dominante touarègue en parallèle de cela une forte occupation jihadistes d’aqmi Mujao et Ansar Idine. Puis s’ajoute à cela la crise du centre qui a  été enclenché par la katibat du Macina en fin décembre 2014 dirigé par Amadou kouffa.


C’est dans cette optique que sous l’égide de la communauté internationale et de la médiation algérienne que les parties signataires à savoir : Gouvernement du Mali, la plateforme et la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA) ont pris l’engagement de rétablir la paix et la réconciliation nationale. Cependant, l’application intégrale et effective de l’accord souffre à cause de la mauvaise situation sécuritaire qui prévaut,  et de la  non maîtrise des étapes et circonstances  à travers lesquelles il a été signé par les acteurs de la crise malienne. À cela s’ajoute également les incompréhensions et les intérêts de la part de certains maliens.

Un accord qui s’applique avec des relectures :

Dans son discours du 19 février devant les membres du conseil national de la transition,  le premier ministre malien Moctar Ouane, a parlé de la volonté de l’ensemble des parties prenantes de l’accord de paix au Mali à diligenter la relecture ainsi qu’ à l’appropriation de celui-ci pour sa mise en œuvre.

Il faut rappeler que cet accord  a été signé au moment où la crise malienne était à son apogée.

« Le contexte était aussi tendu et confus qu’on ne savait pas par où commencer pour aboutir à un compromis afin de mettre un terme à ce cancer qui progressait vers un point de non retour » nous explique un expert malien qui requiert l’anonymat.

En ce moment précis de l’histoire toutes les parties maliennes avaient un seul point en commun, la volonté de retrouver la paix et la stabilité.

Un gouvernement légitime avait signé avec les mouvements un accord sous l’égide de la médiation et cet accord était le seul moyen qui pouvait conduire à une issue de sortie de crise tant attendue.

Les mouvements avaient à d’énormes difficultés à faire accepter cet accord à leurs communautés, les chefs étaient accusés de traîtrise et de corruption mais ils sont arrivés à faire comprendre à ceux qui aspiraient à l’indépendance qu’il n’y a jamais de négociation d’où on peut sortir totalement satisfait. Il avait fallu autant pour le gouvernement vis à vis du reste du peuple malien et de la classe politique.

Néanmoins personne ne peut nier que cet accord à permis la cessation des hostilités, le rapprochement entre les parties et une certaine acceptation mutuelle que nous exploitons aujourd’hui pour animer autour d’une même table des débats politiques constructifs.

‘Il faut noter aussi que cet accord à toujours connu ce que je peux à mon avis appeler relecture puisqu’à chaque étape de mise en œuvre il y avait eu des négociations.

Je peux citer en exemple : l’inclusivité, le DDR accéléré et plusieurs autres aspect qui n’étaient mentionnés dans le document signé par les parties » nous explique la même source pour nous faire savoir suivant toutes les étapes de la mise en œuvre de l’accord,  ses acteurs l’ont toujours fait avancer à travers des consensus.

Ce qu’il faut comprendre et ce qu’il faut faire :

Cette difficile application des accords se traduit par la persistance de la crise sur plusieurs  plans c’est à dire sécuritaire, social, économique et voire politique.

Il faut reconnaître aussi que le pays  connaît depuis après la signature de l’accord de paix au Mali, une crise dans le centre qui a connu une montée en flèche. Ce qui fait d’elle la plus meurtrière et qui déstabilise actuellement de plus en plus le pays  avec ses multiples acteurs qui poussent comme des champignons.  S’ajoute à cela la naissance et l’implantation de l’état islamique dans le liptako Gourma depuis  Septembre 2017.

L’idéal pour l’état est de s’occuper des dossiers qui ont un chemin déjà tracé afin de les mettre de son côté et ceci lui rend non seulement la tâche facile et aussi à ses partenaires qui sont à ses côtés.

Une crise économique qui ne dit pas son nom !

Ces crises ont paralysé toutes les activités économiques du pays. Tous les secteurs sont profondément touchés, notamment le domaine de la cuture, de l’artisanat, du tourisme, de l’Agriculture et ainsi que de la pêche. Et surtout nous voulons mettre l’accent les problèmes  climatiques au nord du pays où on constate une raréfaction de pluies,  les animaux qui meurent, les populations qui s’appauvrissent isolées , l’accès humanitaire devient de plus en plus compliqué dans les zones rurales du nord et du centre.

La situation sanitaire qui est compliqué au Mali le secteur privé est cher les cliniques et les pharmacies ainsi que le secteur public est presque au même niveau. 20 % des maliens ont l’assurance maladie obligatoire alors que le gain par mois d’ un citoyen lambda ne dépasse pas 30 000 Francs soit 46 euros alors que les charges mensuelles dans les villes maliennes sont énormes où le loyer minimum est le plus souvent à 60 000 Francs CFA soit 95 euros. En plus de cela s’ajoute les réalités de la Covid-19 où la population est insouciante à la pandémie.

Sur le plan politique, la question demeure toujours tendue au regard des divergences de vue sur la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation nationale. Nonobstant certaines avancées significatives enregistrées, l’application suscite des problématiques d’une part entre les parties signataires, et d’autre part, entre les citoyens lambdas.

La question qui se pose aujourd’hui est de savoir qu’est ce qui bloque la mise en œuvre de l’accord d’Alger ?

De  2015 à nos  jours,  son application est née des incompréhensions de part ou d’autre. À noter aussi que certains citoyens qui se disent expert sur la question ne maîtrisent pas parfaitement le dossier et induisent la majorité des maliens en erreur lors des débats télévisés ou des radios pour la simple raison que leurs échanges sont pleines de passion. ils ne parlent pas du contexte actuel toujours il regardent dans les rétroviseurs pour se livrer en spectacles aux yeux des téléspectateurs et auditeurs. Les textes de l’accord ainsi que celles du dialogue national inclusif sont méconnus du public à cause de la quasi-totalité d’une population analphabète et aussi du manque de la volonté des acteurs la crise de 2012 à les faire connaître à l’ensemble du peuple malien. Avec ce rythme, la mise en œuvre pose de problèmes et le Mali est loin de retrouver la stabilité, la sécurité, la paix et la réconciliation nationale.

Le Mali est l’un des pays les plus pauvres d’Afrique et du monde ce qui explique par là que sa difficulté à sortir de cette auberge d’insécurité grandissante est dû à  la pauvreté de sa population qui fait face à une gouvernance insouciante sur les différentes problématiques qui empêchent l’unité des maliens. On a tendance à se dire que le problème malien est ethnique mais circulons dans le pays voir si c’est vrai. Un village de 20 à 30 personnes d’une même famille de même sang a du mal a trouver sa stabilité donc il faut comprendre par là que le problème malien n’est pas ethnique il est dû tout simplement à la pauvreté et à l’ignorance.

Résoudre ces petits détails qui sont ignorés du public pourra peut-être donner un espoir d’un Mali nouveau.

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