Par Koffi Dovene
Depuis les événements tragiques du 26 juillet 2023, le Niger connaît une transformation radicale des rôles de l’armée et du pouvoir civil. Il est essentiel de se poser les bonnes questions pour comprendre la situation et chercher des solutions concrètes, plutôt que de rester dans l’incertitude imposée par ce changement brusque de gouvernance. Nous, citoyens, sommes devenus de simples pions dans un jeu où notre voix semble ignorée.
Le rôle de l’armée dans une république
Dans une république, le rôle de l’armée est d’assurer la défense de l’intégrité territoriale, de protéger les citoyens et de garantir la sécurité nationale contre les menaces extérieures. Traditionnellement, l’armée se limite aux opérations extérieures et à la protection du territoire, en respectant la loi et la Constitution. Elle doit rester neutre, éviter toute implication dans les affaires politiques et demeurer sous l’autorité du pouvoir civil.
Cependant, depuis le 26 juillet 2023, l’armée nigérienne semble jouer un rôle bien plus large, devenant actrice de premier plan sur la scène politique. Les généraux, repliés à Niamey, s’investissent dans des actions politiques, délaissant les fronts où la sécurité nationale est pourtant menacée. Cette politisation de l’armée bouleverse la structure établie de la république, menaçant son équilibre et mettant en péril la démocratie.
Politisation de l’armée : un risque pour la stabilité démocratique
La transformation de l’armée en acteur politique, avec des généraux finançant des manifestations et monopolisant le débat public, crée un brouillage entre les rôles civils et militaires. Cette politisation compromet l’indépendance des institutions civiles et fragilise la démocratie, car elle altère l’équilibre des pouvoirs et détourne l’armée de sa mission fondamentale. En prenant parti, l’armée risque d’affaiblir son allégeance à la nation et de favoriser des factions politiques, ce qui pourrait mener à des abus de pouvoir et nuire à la population.
L’impact du remplacement des cadres civils par des militaires.
Le remplacement des cadres civils compétents par des militaires entraîne une perte de compétences indispensables à la bonne gouvernance. Bien que les militaires aient des compétences en discipline et en gestion de crise, leur formation reste limitée dans des domaines cruciaux comme l’économie, le droit ou la diplomatie. Cette situation prive l’État d’expertises spécifiques nécessaires pour répondre aux défis complexes et contemporains.
Avec cette orientation, l’administration risque de devenir rigide, inadaptée aux défis sociaux et économiques, et incapable de promouvoir un développement durable. La militarisation de l’administration peut avoir des conséquences néfastes sur le long terme : ralentissement du développement, instabilité croissante et perte de confiance des citoyens envers leurs institutions. Cette dynamique pourrait amener la population à se tourner vers des solutions radicales, menaçant davantage la stabilité du pays.
Retour à la démocratie : appel aux militaires
Dans ce contexte de confusion, il est essentiel que les militaires retournent à leur mission première : la défense de la nation. La présence militaire doit être active sur les terrains où les menaces sont pressantes, et non dans des bureaux, loin des réalités sécuritaires du pays. En rejoignant les casernes et les fronts, les forces armées renoueront avec leur mission fondamentale, celle de protéger le pays et ses citoyens.
Il est crucial de rétablir une frontière claire entre les rôles civils et militaires, afin de restaurer l’efficacité de l’État et de préserver la confiance de la population envers les institutions. Le retour de la démocratie, fondée sur le respect du pouvoir civil et le rétablissement des compétences civiles dans l’administration, est nécessaire pour permettre au Niger de se relever et d’assurer un avenir stable et prospère.
En conclusion, la neutralité de l’armée et son retour aux casernes sont essentiels pour restaurer la démocratie et renforcer l’État. L’administration civile doit être renforcée par des compétences spécialisées pour mener les réformes nécessaires, et l’armée doit se concentrer sur sa mission de protection de la nation, en laissant la politique aux institutions civiles.
Koffi dovene:
Juriste /défenseur des droits humains .
Secrétariat général du cadre d’action pour la démocratie et les droits de l’homologation (CADDRH)
Membre du Conseil de Résistance pour le Renouveau Démocratique Africain, CRR-DA.
Chercheur sur les dynamique sociale et les questions d’extremisme et la criminalité transfrontaliere organisée.